Les femmes qui écrivent vivent dangereusement
Stefan Bollmann, Laure Adler
Editions Flammarion - 2007
Après Les femmes qui lisent sont dangereuses (2006) des mêmes auteurs, également chez Flammarion.
D'après Laure Adler, les femmes qui écrivent n'ont pas voulu être des écrivains, elles le sont devenues, souvent au prix de tourments et de souffrances. La nécessité d'écrire s'est imposée à elles, les a harcelées. "Une femme qui écrit est la créatrice d'un univers, une semeuse de désordre, une personne qui se met en risque et qui ignore le danger tant sa tâche la requiert, une personne qui invente la langue, sa langue, notre langue."
Si le besoin d'écrire s'exprime parfois dans la douleur, les difficultés sont propres à chacune, selon son itinéraire, ses rencontres, sa place dans son époque.
"Car il n'y a pas, à mon sens, de communauté d'écrivains femmes. Ce n'est pas une entité, la femme écrivain, un logo, une marque de fabrique.
Il existe seulement des femmes qui écrivent."
Laure Adler montre comment le statut de la femme écrivain a accompagné au cours du temps l'évolution des autres femmes : Illettrées (Christine de Pisan), courtisanes (Mlle de Scudéry, Mme de Lafayette), révolutionnaires (Mme de Staël, George Sand), solitaires (Jane Austen), solaires (Colette), militantes (Milena Jesenska), penseuses (Simone de Beauvoir, Marguerite Yourcenar), métisses (Assia Djebar).
Elle évoque l'influence de leurs mères sur Colette, Marguerite Duras, Nathalie Sarrraute. Auraient-elles écrit de la même façon, sans elles ?
Stefan Bollmann, lui, se demande si les femmes écrivent autrement des hommes.
"Dans la perception que l'on a des hommes qui écrivent, le sexe ne joue guère de rôle, tandis que les femmes doivent s'attendre à ce que leur œuvre soit évaluée sous l'angle de la petite différence, qui a de si grandes conséquences."
Il montre que de nos jours, le danger pour les femmes qui écrivent n'est pas du même ordre, que l'on soit américaine or allemande, iranienne ou pakistanaise.
Dans le passé, les femmes ont peiné pour se libérer des contraintes de leur quotidien, pour trouver le temps d'écrire. Quelle difficulté parfois d'avoir un espace à soi pour s'isoler !
Beaucoup de femmes écrivains ont dû choisir entre l'écriture et leur vie de femmes et de mère, soit en différant l'une par rapport à l'autre, soit en renonçant carrément à toute vie familiale. Parfois, elles ont nié leur sexe en adoptant un pseudonyme masculin (George Sand, George Elliot).
Enfin, dernière question soulevée par Stefan Bollmann : S'il est reconnu que la source d'inspiration des hommes écrivains est souvent une femme, qui est "la muse" des femmes écrivains ?
Ce livre présente ensuite une cinquante de femmes écrivains, avec pour la plupart une double page : d'un côté, un portrait (tableau ou photo) et de l'autre un commentaire rapide sur la femme et l'œuvre.
J'ai découvert certaines qui m'étaient inconnues, comme Miles Franklin ou Rahel Varnhagen, et d'autres encore. Je me suis rappelé Johanna Spyri, auteur de Heidi, que j'ai appréciée dans mon enfance.
Quel plaisir de retrouver Colette, Marguerite Duras, leurs photos sont très émouvantes.
Les auteurs contemporaines ne sont pas oubliées : Doris Lessing, Paula Fox, Arundhati Roy, Toni Morrison, par exemple.
Plus encore que "Les femmes qui lisent sont dangereuses", j'ai apprécié ce livre, qu'il faudrait avoir dans sa bibliothèque, afin de le feuilleter régulièrement, pour simplement admirer ces portraits de femmes ou s'attarder sur la vie et l'œuvre de l'une d'entre elles, selon l'humeur du moment.