Paru chez Stock (2010)
Shimura-san est célibataire et vit seul dans une maison de Nagasaki, face aux chantiers navals. Il travaille aux services météorologiques de la ville et mène une existence monotone, partagée entre sa maison et son bureau, à peine égayée quelquefois par la visite de sa soeur et de son beau-frère.
Depuis quelque temps, Shimura-san a l'impression que quelqu'un s'introduit chez lui, à cause d'objets déplacés ou disparus de son réfrigérateur. Lorsqu'il a la preuve que le niveau de jus d'orange dans la bouteille a baissé entre le matin et le soir, il s'équipe d'un ordinateur et d'une caméra, installe le tout chez lui ainsi que le logiciel qui lui permettra de surveiller son intérieur depuis son bureau. Et en effet, il ne tarde pas à découvrir une femme dans sa cuisine, se préparant du thé et du riz, profitant de son absence.
A la police qu'il fait intervenir, la femme, découverte dans sa cachette, un placard de la pièce au tatami, avouera qu'elle vit presque sans interruption depuis un an dans la maison de Shimura. Bien que déstabilisé par cette intrusion, Shimura en arrive presque à regretter d'avoir appelé la police, au lieu de ne pas avoir géré lui-même cette présence qui aurait rompu sa solitude. La femme est condamnée à quelques mois de prison et c'est à son tour de prendre la parole, expliquant les circonstances qui l'ont amenée dans cette maison et qui ne devaient rien au hasard.
C'est l'histoire de deux solitudes, de deux êtres fragilisés par l'ancienne blessure de leur ville, qui n'ont pas trouvé leur place dans la société contemporaine et qui vivent, chacun à sa façon, en marge, exclus. J'ai trouvé ce roman très émouvant, alternant l'irréel, comme lorsque Shimura se demande si sa maison est hantée, et la réalité, quand la femme évoque la dégradation de sa situation qui la transforme en SDF. J'aurais aimé en savoir davantage sur ces deux personnages, sur leur vies passées à peine évoquées.
Je ne connaissais pas l'auteur, Eric Faye, qui a obtenu avec ce livre le grand prix du roman de l'Académie Française 2010. Ce roman est tiré d'un fait divers paru dans la presse japonaise en 2008. C'est un livre court, qui se lit rapidement mais reste longtemps en mémoire, grâce à l'ambiance qui s'installe et aux interrogations qui demeurent.
L'avis de Calepin et un article de Viabooks.
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