Queen of dreams - Chitra Divakaruni
Abacus (2005)
Rakhi est une jeune artiste peintre, d’origine indienne. Elle vit à Berkeley, avec sa fille Jona, dont elle partage la garde alternée avec Sonny, son mari dont elle s’est séparée. Pour gagner sa vie, Rakhi gère avec son amie Belle un salon de thé, mais l’installation d’un concurrent, affilié à une célèbre chaîne de magasin juste en face vient mettre à mal la pérennité de leur affaire.
Depuis l’enfance, Rakhi s’interroge sur sa mère, dont l’activité consiste à percevoir et analyser les rêves des autres et en particulier des clients qui la consultent par téléphone. Rakhi souffre du désintérêt de sa mère envers elle et méprise son père, un peu trop porté sur la bouteille. Sa relation avec Sonny, son mari, est très conflictuelle et Rakhi se rend compte que Jona se détache d’elle, préférant de plus en plus la compagnie de son père.
La disparition accidentelle de sa mère plonge Rakhi dans le désespoir mais contribue à la rapprocher malgré elle de son père. Ensemble, ils lisent le journal intime qu’a laissé la mère, dans lequel elle raconte son parcours d’interprète de rêves, les choix qu’elle a dû faire pour préserver son don et sa frustration de ne pas avoir pu décoder les rêves de Rakhi.
Dans ce roman, plusieurs voix s’expriment tour à tour, celle de Rakhi qui livre ses angoisses et ses interrogations, celle de la mère au travers du journal des rêves et celle d’un narrateur anonyme qui décrit le quotidien de Rakhi, lorsqu’elle peint, lorsqu’elle travaille au salon de thé, et qui revient également sur sa rencontre avec Sonny, sur leur vie commune et la dégradation de leurs relations.
C’est une lecture pleine de contrastes : le journal des rêves emporte le lecteur dans un monde irréel, fantasmé, où l’imaginaire tient une grande place, mais il raconte aussi les souffrances de la mère, qui a quitté une existence recluse et protégée dans l’espoir d’une vie normale et qui a échoué.
Rakhi, quant à elle, se débat entre les rêves qui l’assaillent souvent et qu’elle peine à comprendre, et les réalités très banales d’une jeune mère, en conflit permanent avec son ex-mari, confrontée aux incertitudes de l’artiste et aux difficultés professionnelles lorsque la survie du salon de thé est menacée. Elle doit également faire face au racisme et à la violence des « vrais » américains suite aux attentats du 11 septembre 2001. Elle s’interroge alors sur son intégration dans la société californienne, alors qu’elle s’était toujours considérée comme une américaine. Grâce au journal des rêves, Rakhi grandit, en quelque sorte et peut entamer une nouvelle relation avec son père, qui lui-même y a également découvert des choses qu’il ignorait sur sa femme. Plus forte, Rhaki peut alors sortir de son statut de victime et reconsidérer sa relation avec son mari.
C’est une lecture en V.O . qui n’a pas été facile mais que j’ai appréciée, néanmoins. Ma perception de la mère a évolué au fur et à mesure que j’avançais dans ce livre : au début, elle incarne plutôt la bienveillance, grâce à ses capacités d’écoute et de compassion. Mais au fil de l’histoire, après sa disparition, la lecture de son journal et les changements qui interviennent dans la vie de Rakhi ont modifié mon ressenti. C’est comme si le poids de l’influence de la mère sur Rakhi et son père les avait englués dans une attitude passive, les maintenant dans des rôles où ils ne pouvaient exprimer leurs pleines capacités. Au-delà du chagrin, la disparition de la mère les libère et les fait renaître, amenant une fin ouverte, source d’espoir.
Les avis de Clarabel, Alice, Soukee et Essel.
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