lundi 23 décembre 2019

Le discours

Le discours – Fabrice Caro

Gallimard (2018)

Dîner de famille chez les parents d’Adrien, en compagnie de Sophie, sa sœur, et de Ludovic, son futur beau-frère. D’ailleurs, Ludo vient d’informer Adrien qu’il compte sur lui pour faire le discours lors de la cérémonie de leur mariage, ce qui plonge Adrien dans la confusion car il n’a vraiment pas la tête à ça. Déjà trente-huit jours que son ex, Sonia, a décidé de mettre leur relation en pause et qu’il est sans nouvelles d’elle. Trente-huit jours qu’il réfrène l’envie de l’appeler ou de lui envoyer un texto, suivant la « théorie qui veut que l’absence renforce la présence, qu’il faut nourrir la cristallisation comme on nourrit un animal de compagnie, créer le manque, laisser le champ libre au mystère. » Et puis, à 17h24, juste avant de partir chez ses parents, Adrien a craqué et a envoyé un SMS à Sonia, ravi de voir qu’elle l’a lu à 17h56 et consterné de constater, au fil des heures qui s’écoulent pendant ce dîner, qu’elle ne lui répond pas.
Alors que le dîner se déroule sans autre surprise que la demande de discours, Adrien imagine les circonstances qui pourraient expliquer que Sonia ne soit pas en mesure de lui répondre, il se remémore les étapes de leur relation, la rencontre, les premiers moments idylliques et puis la routine qui s’installe, conduisant à cette pause imposée. S’intercalent avec les souvenirs les échanges entre les convives, les rituels immuables du dîner, la difficulté pour Adrian de s’extraire d’un rôle pré-attribué et ses tentatives d’élaboration du futur discours.


Tout cela pourrait être banal sans le ton burlesque qui accompagne les pensées d’Adrien et sa perception du déroulé du repas, ses interrogations sur la conduite à tenir vis-à-vis de Sonia, ses velléités de refuser la charge du discours et sa conscience que les évènements lui échappent, quoi qu’il fasse.

Ce roman de Fabrice Caro, auteur de BD bien connu sous le nom de Fabcaro, avait été recommandé par mon libraire lors de la soirée de présentation des coups de cœur 2018 et cette mise en avant était bien méritée. J’ai beaucoup ri à la lecture de ce livre, je trouve que les travers des repas de famille y sont vraiment bien représentés. Cette impression de toujours revivre la même chose, d’être placé dans un rôle dont on ne peut se sortir et qui ne correspond plus à ce qu’on a pu être à un moment de sa vie, je l’ai déjà éprouvée. Dans la réalité, on ressent plutôt un malaise face à cette situation, mais ici, c’est un comique désabusé qui s’exprime et on s’amuse beaucoup. Les tergiversations du héros à propos de son texto à Sonia sont aussi très drôles - Pourquoi ne me répond-elle pas, Ah mais oui, j’aurais dû mettre un point d’interrogation à la fin de ma phrase plutôt qu’un point d’exclamation, je vais peut-être écrire à sa meilleure copine pour savoir comment elle va, Mais non, c’est encore plus nul… - elles s’inscrivent bien dans l’air du temps et à l’ère de la communication immédiate.

Un livre à ne pas négliger si vous le trouvez sur votre chemin.

J’ai vu que Fabrice Caro avait un autre roman à son actif, Figurec publié en 2006. Il n’est pas à la médiathèque mais j’espère malgré tout avoir l’occasion de le lire.


D'autres avis élogieux sur le blog de Krol et sur Folittéraires.

2 commentaires:

  1. Effectivement, une lecture agréable, même si pas impérissable. Beaucoup de petites notations très justes, l'auteur est observateur (le coup d'oeil du dessinateur, sans doute)

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