mardi 4 février 2020

Une longue impatience

Une longue impatience – Gaëlle Josse

Éditions Noir sur Blanc (2017) - Notabilia

Avril 1950, dans un bourg breton non nommé. Louis, un garçon de 16 ans, n’est pas rentré chez lui. Sa mère, Anne, la narratrice, ne sait que trop ce qui a pu provoquer cette fugue. Elle veut croire les gendarmes, rassurants, qui affirment qu’il va bientôt rentrer. Où irait-il, à cet âge-là, sans argent ? Mais les jours passent et toujours aucune nouvelle du garçon. Une remarque d’un des gendarmes la conduit au port voisin. Sur le registre de la capitainerie, l’officier des Affaires maritimes retrouve bien le nom de Louis. Il s’est embarqué sur un navire de commerce, à destination de la Réunion, puis Durban, Buenos Aires et Valparaiso. Le bateau devrait revenir peu avant Noël. Commence alors une longue attente pour Anne avec deux vies en parallèles : celle d’une mère de famille de deux jeunes enfants et d’épouse du pharmacien qui tente d’assumer le quotidien, et celle d’une mère pleine de l’espoir de revoir son fils, qui scrute la mer, perchée sur la falaise, qui se remémore les épreuves qu’elle et Louis ont traversées, qui prépare le retour de son fils.

C’est un roman poignant et fort. Anne est une héroïne magnifique, tout en retenue, modeste et endurante. C’est une femme qui ne se plaint pas, une femme qui garde espoir, qui écrit des lettres lumineuses à son fils, lui racontant le festin qu’elle lui réserve pour le jour de son retour.

Je ne peux pas trop raconter ce qui se passe dans ce livre pour ne pas trop en dévoiler. Mais, comme d’habitude avec Gaëlle Josse, on est immergé dans l’ambiance qu’elle installe si bien, on vit au côté de l’héroïne, on ressent ses états d’âme, son courage, on comprend son dilemme et sa retenue de femme des années cinquante, on sent le temps qui passe et l’espoir qui ne faiblit pas.

Le titre du livre aurait pu être « Une longue patience » mais il n’aurait pas traduit correctement l’état d’esprit de son héroïne. Je ne l’ai pas sentie patiente, ça voudrait dire qu’elle s’est résignée. Elle ne se résigne pas, elle vit en elle le retour de son fils et elle se prépare à la fête, avec impatience.

Page 89
Et à table, je serai là, au milieu de vous tous, car ce jour-là, la maison sera ouverte à tous ceux qui voudront se joindre à nous et se réjouir, ce sera table ouverte, je le veux ainsi, ce sera un temps pour oublier les mauvais regards, les paroles amères, les curiosités déplaisantes, les jalousies. Je veux croire que ceux qui nous rejoindront ne seront là que pour partager notre joie.

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