Éditions Autrement (2013)
Deux histoires se déroulent dans ce livre, dans un train reliant la France et la Russie, et mettent en scène deux jeunes filles pleines d’espoir, pour qui le bout du voyage doit être synonyme d’une vie nouvelle.
Tout d’abord, Anna Alexandrovna, fille du grand-duc Alexandre Feodorovitch Oulianov, qui, après un hiver passé sur la côte d’Azur, prend place dans les wagons luxueux du Nice-St-Pétersbourg avec sa famille en ce jour de 1881 pour regagner la Russie à l’issue d’un long voyage. Elle a quinze ans, est une cavalière accomplie. Elle sait déjà qu’elle n’est pas belle, et elle est bouleversée par la découverte d’un secret à propos de ses origines. Heureusement, ce retour vers la Russie la ramène vers Dimitri, jeune cadet du Tsar, qui a admiré son allure à cheval et qui lui en a fait le compliment. Alors Anna espère qu’il demandera sa main lorsqu’ils se reverront à St-Pétersbourg.
Plus d’un siècle plus tard, en 2012, c’est Irina qui embarque à Moscou dans le Riviera Express en direction de Nice où elle doit rencontrer le bel Enzo, dont elle a fait connaissance sur Internet. Il lui a envoyé l’argent pour le billet et Irina veut croire à sa sincérité, repoussant les prédictions défavorables de son amie Oksana. Irina connait déjà les mauvais côtés de la vie, le malheur et la misère, elle sait que les propositions de mariage émanant d’inconnus cachent parfois de sombres trafics. Mais elle est décidée à tenter l’aventure.
J’ai retrouvé avec plaisir l’écriture de Gaëlle Josse, que j’avais découverte dans Les heures silencieuses. Elle sait à merveille décrire les lieux confinés, comme ici les compartiments des wagons-lits et en même temps faire percevoir à son lecteur les paysages qui défilent à l’extérieur.
D’une plume sensible et délicate, Gaëlle Josse nous fait partager les pensées intimes des deux jeunes filles au cours du long voyage en train. Toutes deux, elles cherchent l’Amour, en attendent beaucoup et sont prêtes, chacune à sa façon, à faire ce qu'il faut pour l’obtenir. Et puis, elle raconte la Russie d’hier et d’aujourd’hui, avec toujours les conflits armés où meurent les jeunes gens ou dont ils reviennent traumatisés à jamais. Dans le dernier chapitre, comme un épilogue, par la voix de celui qui attend Irina sur le quai de la gare de Nice, Gaëlle Josse ferme la boucle qui relie les deux époques et montre une dernière fois que la recherche d’amour est universelle.
Page 52 :
Le train poursuit son avancée dans la nuit, comme s’il ouvrait la terre droit devant lui, rejetant les ténèbres de part et d’autre de la voie. La nuit est noire, d’un noir dense, serré, d’où toute trace de gris a disparu.Page 157 :
J’ai rêvé de longues plaines de bouleaux et de troïkas dans la neige, de gestes et de regards furtifs échangés dans les couloirs des palais des bords de la Neva, de bruissements de robes et de serments dérobés, de billets glissés par les servantes et d’éventails agités devant des visages troublés. J’ai rêvé d’amour et d’exil, moi qui n’ai jamais connu l’amour et qui ne suis jamais parti.D'autres avis sur ce livre : celui de l'Insatiable Charlotte et celui de Clara.
Je l'ai également. j'avais rencontré Gaëlle Josse au salon du livre et nous avions discuté. C'est vraiment une femme abordable et véritablement sympathique.
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