Éditions Rivages (2011)
Le 13 mai 1961, Michel Boujut arrive à Paris par la gare d'Austerliz. A la une des journaux, il découvre la mort de Gary Cooper, survenue la veille à Hollywood.
Michel Boujut, déjà fan de cinéma, n'oubliera jamais ce jour qui marque le début de sa désertion de l'armée, où il effectuait son service militaire, à la veille de son départ vers l'Algérie. Avant de rallier l'Allemagne puis la Suisse, il profite de son séjour dans la capitale pour se réfugier dans les salles obscures du Quartier Latin, afin d'échapper aux contrôles et de passer le temps. Il découvre des chefs-d'oeuvre et des nanars, des films américains, suédois, italiens, français. Il rencontre des intellectuels et des militants qui le soutiennent dans sa décision de ne pas participer à la guerre d'Algérie et qui l'aident dans sa fuite vers l'étranger.
Je connaissais Michel Boujut grâce à ses émissions sur le cinéma mais j'ignorais tout de cette période de sa vie et de son statut d'insoumis. J'ai trouvé beaucoup d'intérêt dans ce témoignage.
Michel Boujut évoque son grand-père, mort aux combats pendant la Grande Guerre et son père, fait prisonnier en 1940 et qui ne rentra chez lui que quatre ans plus tard. Il raconte sa prise de conscience, l'évolution de sa réflexion, son plan bâti minutieusement : profiter de ses quelques jours de permission pour prendre le large.
Le sujet est grave mais jamais pesant car l'auteur alterne les courts chapitres, passant des expériences de ses parents et grand-parents à ses souvenirs cinématographiques et aux étapes de sa cavale. Il nous livre ses impressions à propos des films qu'il voit ou qu'il a vus, fait partager les instants d'une passion pour le cinéma qui l'habite toujours.
Un extrait à propos du film Pour qui sonne le glas (p. 82) :
Qu'ai-je retenu de la projection au Bonaparte ? Qu'a-t-elle fait remonter en moi ? Le romantisme des maquis, l'amour fou, la révolte. Tout ce qui me vient du surréalisme, l'école de mon adolescence avec ses mots d'ordre si fiers et foudroyants. Je sais aujourd'hui que le souvenir des films compte au moins autant que les films eux-mêmes, puisque notre relation avec eux est de l'ordre de l'intime. Ils nous regardent, comme nous les regardons. Ils nous prennent par la main et nous consolent, nous accompagnent comme nous les accompagnons. Ils grandissent ou s'éloignent. Mais ils nous appartiennent, ils font partie de notre vie. Jordan et Maria, je les serre toujours contre mon coeur.
Merci à Babelio et aux éditions Rivages pour ce livre, que j'ai lu avec grand plaisir.
Un petit coucou en passant pour te souhaiter un bon dimanche Nanou !
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