mardi 15 mars 2016

L'annonce

L'annonce - Marie-Hélène Lafon

Buchet/Chastel (2009)

Doux quarante-six ans cherche jeune femme aimant la campagne. Aimait-elle la campagne. Était-elle jeune. Oui. Elle était plus jeune que l’agriculteur de l’annonce domiciliée numéro CF41418. Elle répondrait. Elle appellerait au numéro du service vocannonce, elle serait d’abord à l’abri du téléphone. Elle essaierait. Pour ça elle aurait la force. Il le faudrait. Un autre hiver flasque commençait dans le vide de Bailleul. Éric. Il était sorti du cabinet du dentiste, gentil, un peu dolent, pressé de rentrer et d’être avec elle, eux seuls les deux, dans la petite cuisine. Il ne deviendrait pas quelqu’un comme ça, il n’aurait pas de place, il ne ferait pas sa place. Elle devait changer, partir, inventer, ailleurs et autrement. La campagne pourquoi pas. Ailleurs. S’arracher. (page 76-77)

Parce qu’elle veut changer sa vie et celle de son fils, parce qu’elle croit qu’il est possible de recommencer quelque chose, Annette, trente-sept ans, répond à l’annonce de Paul, un paysan du Cantal, qui lui aussi a l’espoir de vivre autrement que ce que sa sœur et ses oncles envisagent pour lui. Elle vient donc s’installer avec son fils dans la ferme de Paul, quittant le Nord et y laissant son seul point d’ancrage, sa mère. Paul, c'est un homme silencieux mais calme et décidé, qui sait imposer ses décisions par la persévérance, face à sa sœur et à ses oncles qui sont installés dans une routine dont ils se contentent et qui voient arriver ces deux "étrangers" du Nord en se demandant combien de temps ils tiendront avant de renoncer.
Annette sait que cette nouvelle vie ne sera pas facile, mais elle veut y croire, pour elle et pour son fils. Comme Paul, elle parle peu, elle n’a pas les mots mais elle ne craint pas l’effort, elle sait s’adapter et surtout, elle se sent en sécurité dans cette région, loin de Didier, le père de son fils, homme violent et imprévisible. Alors, petit à petit, elle fait son nid dans le peu d’espace qui lui est réservé, face à l’indifférence des oncles et à l’hostilité larvée de Nicole, elle gagne le droit d’être là sans le revendiquer, mais sans céder un seul pouce du terrain.

C’est une belle histoire que Marie-Hélène Lafon raconte dans ce roman simple et prenant, celle de deux êtres aux parcours très différents, qui grâce à cette annonce, se croisent un jour et décident de cheminer ensemble, d’associer leurs expériences, d’en tirer profit pour construire un avenir sur une base sincère et sans artifice. C’est aussi une vision de la vie à la campagne, loin de l’agitation des villes, c’est le quotidien des petits agriculteurs et éleveurs, celui dont on entend parler dans les médias quand c’est la saison du salon de l’Agriculture et que l’on oublie ensuite.

J’ai beaucoup aimé l’écriture de Marie-Hélène Lafon, que j’ai découverte avec ce roman. Pas de dialogues, des phrases qui s’enchaînent et qui décrivent les situations et les ressentis, sans excès, juste les mots qu’il faut mais qui disent si bien ce qui est.

D'autres avis : ceux de Yohan, Jostein, Clara et sur Babelio.

5 commentaires:

  1. Comme toi, j'ai découvert (et apprécié) la plume de Marie-Hélène Lafon avec ce roman.
    Et en écrivant cela, je me demande pourquoi je n'ai pas continué sur ma lancée (alors même que plusieurs de ses romans attendent dans ma PAL)...

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    1. Il y a tellement de livres à lire !
      Je viens d'emprunter un autre de ses livres, Joseph, à la médiathèque. L'as-tu lu ?

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    2. Non, mais c'est justement l'un de ceux qui patientent toujours dans ma PAL.

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  2. Bonjour Nanou, ce roman lu il y quelques années m'avait aussi beaucoup plu. C'est écrit dans un style dont il faut s'approprier. http://dasola.canalblog.com/archives/2009/11/19/15325536.html Bonne journée.

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    1. C'est vrai qu'il faut s'habituer au style. Mais on s'y fait vite, je trouve. En tout cas, ça n'a pas gêné ma lecture.
      Merci pour le lien vers ton billet.

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