mardi 18 janvier 2011

Nagasaki

Nagasaki - Éric Faye
Paru chez Stock (2010)

Shimura-san est célibataire et vit seul dans une maison de Nagasaki, face aux chantiers navals. Il travaille aux services météorologiques de la ville et mène une existence monotone, partagée entre sa maison et son bureau, à peine égayée quelquefois par la visite de sa soeur et de son beau-frère. 
Depuis quelque temps, Shimura-san a l'impression que quelqu'un s'introduit chez lui, à cause d'objets déplacés ou disparus de son réfrigérateur. Lorsqu'il a la preuve que le niveau de jus d'orange dans la bouteille a baissé entre le matin et le soir, il s'équipe d'un ordinateur et d'une caméra, installe le tout chez lui ainsi que le logiciel qui lui permettra de surveiller son intérieur depuis son bureau. Et en effet, il ne tarde pas à découvrir une femme dans sa cuisine, se préparant du thé et du riz, profitant de son absence. 
A la police qu'il fait intervenir, la femme, découverte dans sa cachette, un placard de la pièce au tatami, avouera qu'elle vit presque sans interruption depuis un an dans la maison de Shimura. Bien que déstabilisé par cette intrusion, Shimura en arrive presque à regretter d'avoir appelé la police, au lieu de ne pas avoir géré lui-même cette présence qui aurait rompu sa solitude. La femme est condamnée à quelques mois de prison et c'est à son tour de prendre la parole, expliquant les circonstances qui l'ont amenée dans cette maison et qui ne devaient rien au hasard.

C'est l'histoire de deux solitudes, de deux êtres fragilisés par l'ancienne blessure de leur ville, qui n'ont pas trouvé leur place dans la société contemporaine et qui vivent, chacun à sa façon, en marge, exclus. J'ai trouvé ce roman très émouvant, alternant l'irréel, comme lorsque Shimura se demande si sa maison est hantée, et la réalité, quand la femme évoque la dégradation de sa situation qui la transforme en SDF. J'aurais aimé en savoir davantage sur ces deux personnages, sur leur vies passées à peine évoquées.

Je ne connaissais pas l'auteur, Eric Faye, qui a obtenu avec ce livre le grand prix du roman de l'Académie Française 2010. Ce roman est tiré d'un fait divers paru dans la presse japonaise en 2008. C'est un livre court, qui se lit rapidement mais reste longtemps en mémoire, grâce à l'ambiance qui s'installe et aux interrogations qui demeurent.

L'avis de Calepin et un article de Viabooks.
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jeudi 13 janvier 2011

Une femme drôle

Une femme drôle - Maryline Desbiolles
Éditions de l'Olivier - Collection Figures libres (2010)

Une femme drôle, c'est d'abord l'évocation de Zouc, cette femme vêtue de noir qui se produisait sur scène dans les années 70. Elle venait de Suisse, elle était massive, inquiétante, dérangeante et savait, au fil de ses sketches, se transformer en petite fille apeurée, en mère effrayante, en cliente chez le coiffeur, en commère de quartier, et bien d'autres figures féminines, toujours crédibles, toujours vraies.
C'est aussi de son enfance, puis de sa jeunesse, que nous parle Maryline Desbiolles : Son enfance en Savoie, chez ses grand-parents, dont l'accent était si proche de celui de Zouc, sa grand-mère et sa mère qui étaient drôles, elles aussi. Les souvenirs s'entremêlent, la vie de l'auteur, ses "rencontres" avec l'artiste, sur scène, à la télé et puis ce dernier rendez-vous manqué à cause d'un téléphone capricieux.

Extrait (p.42) :
Je prends tout de Zouc, je ne fais pas de détail, il n'y a pas ce que j'aime un peu moins, ce que j'adore, une période particulière, il n'y a pas d'avant et pas d'après, je gobe toutes les énormintés de Zouc proférées par son gros corps massif de matrone. Le gros corps contenu dans la robe noire, pas ample, un étui, une boîte, l'horloge comtoise, étrange évocation, car je n'aimais pas du tout les horloges comtoises que collectionnait mon grand-père paternel, ni ses coucous suisses, surtout pas les coucous suisses, pendants grotesques des sinistres horloges comtoises, tout cet attirail faisant un raffut d'enfer à chaque heure du jour et de la nuit, d'autant que mon grand-père n'arrivait jamais à régler ses appareils pour qu'ils sonnent en même temps, ou alors prenait-il un malin plaisir, en musicien méconnu qu'il était, à ce que la cacophonie s'éternisât, Zouc me fait avaler même l'horloge comtoise (mais pas le coucou suisse).

J'ai découvert ce livre grâce à l'émission de Kathleen Even, l'Humeur vagabonde, le 4 novembre 2010 sur France-Inter, au cours de laquelle elle recevait Maryline Desbiolles.
Comme souvent, cette émission m'a donné envie d'aller plus loin dans cette rencontre, de redécouvrir Zouc à travers les souvenirs de l'auteur et de partager son évocation.

Un livre court mais riche en sensations et en émotions.

Des vidéos de Zouc à retrouver ici ou .
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samedi 1 janvier 2011

1er Janvier !

Bonne année à tous !

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