lundi 27 octobre 2008

La réconciliation

La réconciliation - Anne-Constance Vigier
Editions Joëlle Losfeld - 2008

La narratrice, la quarantaine, traductrice, élève seule ses deux jumeaux adolescents. Alors qu'ils partent sans elle en vacances au Sénégal, elle est contrainte d'héberger son père qui vient passer une série d'examens médicaux dans l'hôpital en face de chez elle.
Cette visite contrarie ses projets. En effet, la jeune femme espérait profiter de sa solitude pour avancer dans une traduction qu'elle a des difficultés à aborder. Puis elle lui cause beaucoup d'appréhension. Face à son père, elle se sent toujours l'adolescente qu'elle était, confrontée à un homme tyrannique et hargneux, imposant sa loi à toute la famille.
En réalité, lors de ce séjour, elle se retrouve face à un homme vieilli et affaibli, diminué dans sa superbe passée par l'incertitude sur son état de santé.

J'ai beaucoup apprécié cette lecture, sans doute parce que les appréhensions de la narratrice me sont familières. Comment affronter à l'âge adulte des parents qu'on a craints, dont on a été contraint de subir l'autorité et les principes ? Et cela sans retomber dans les révoltes adolescentes ou sombrer dans la déprime paralysante ?

La réconciliation du titre arrivera bien. A défaut de s'exercer vis à vis du père, c'est avec elle-même que la narratrice fait la paix. Sans heurts, elle réussit à s'affirmer face à ses parents et à les replacer dans leurs responsabilités, même si sur l'instant, elle a l'impression de fuir lâchement.


En résumé, un livre court (139 pages) qui a suscité chez moi beaucoup de réflexions.


Un extrait :
"Il ne faudrait pas que vous soyez en retard, dis-je en faisant semblant de regarder ma montre, et ils se levèrent pesamment comme si je leur avais donné l'ordre de disparaître de ma vue, sur l'épaule de mon père la bandoulière de son sac que je lui avais demandé de prendre en quittant l'appartement et j'eus brusquement honte. Je t'appelle, me glissa ma mère en m'embrassant, j'évitai à nouveau de laisser mes joues toucher celles de mon père, je ne regardai ni l'un ni l'autre s'éloigner vers l'hôpital."

lundi 20 octobre 2008

Pluie et vent sur Télumée Miracle

Pluie et vent sur Télumée Miracle - Simone Schwarz-Bart
Le Livre de Poche - 1975

Télumée vit en Guadeloupe, avec sa grand-mère, Reine sans Nom. Son arrière-grand-mère, Minerve, était esclave puis a été affranchie. Malgré cela, le poids de l'esclavage pèse sur les femmes de la lignée et Télumée le ressent encore fortement. Toute sa vie, qui nous est racontée ici, elle doit se battre pour exister, chaque bonheur reçu n'est jamais définitif. Malgré cela, Télumée trouve dans les enseignements de sa grand-mère et dans l'amour qu'elle lui a prodigué, la force de continuer.

Cette lecture m'a souvent remis en mémoire "La légende d'une servante" de Paula Fox que j'ai lu il y a quelque mois. Là aussi, il était question d'une petite fille des Caraïbes, de son amour pour sa grand-mère et de sa nostalgie pour son île, une fois qu'elle avait été emmenée à New-York. Ici, Télumée reste sur son île, se bat pour construire son bonheur avec Elie, puis le quitte pour échapper à sa violence et à sa folie, puis reconstruit un autre bonheur, pour un temps.

C'est encore une fois un parcours de femme qui est raconté ici par Simone Schwarz-Bart, dans une langue entre l'écrit et l'oral, qui exploite la culture créole, ses croyances et ses proverbes pour chaque situation de la vie. Une vie difficile, de travail et de souffrances, à laquelle Télumée tient pourtant, jusqu'au bout.

Extraits :
(La première fois que Télumée découvre Fond-Zombi, le village de sa grand-mère)
Et puis soudain ce fut l'Autre Bord, la région de Fond-Zombi qui déferlait devant mes yeux, dans une lointaine éclaircie fantastique, mornes après mornes, savanes après savanes jusqu'à l'entaille dans le ciel qui était la montagne même et qu'on appelait Balata Bel Bois. De-ci de-là apparaissaient des cases appuyées les une contre les autres, autour de la cour commune, ou bien se tassant sur leur propre solitude, livrées à elles-mêmes, au mystère des bois, aux esprits, à la grâce de Dieu...

(Le dernier paragraphe)
Comme je me suis débattue, d'autres se débattront, et, pour bien longtemps encore, les gens connaîtront même lune et même soleil, et ils regarderont les mêmes étoiles, ils y verront comme nous les yeux des défunts. J'ai déjà lavé et rincé les hardes que je désire sentir sous mon cadavre. Soleil levé, soleil couché, les journées glissent et le sable que soulève la brise enlisera ma barque, mais je mourrai là, comme je suis, debout, dans mon petit jardin, quelle joie !...

Ce roman fait partie de mon défi lecture 2008 Le nom de la rose, dans la catégorie "Un phénomène météorologique".

dimanche 19 octobre 2008

London Swap (2)

J'ai reçu jeudi le colis que m'a envoyé Cryssilda, qui est donc ma swappeuse pour ce swap, organisé par Ys.

Je suis ravie de ses choix :
  • Mrs Dalloway de Virginia Woolf, que j'espérais recevoir, car j'ai très envie de le lire et de découvrir l'auteur par cette première lecture.
  • Le peuple d'en bas de Jack London : Je ne connaissais pas ce titre. Je vais ainsi plonger à la suite de l'auteur dans le Londres du XXème siècle, ce qui était une de mes attentes pour ce swap.
  • Une carte sur la relève de la garde : Typique, non !
  • Un pin's de l'Ours Paddington
  • Côté gourmandises : des gâteaux fourrés aux fruits et de la gelée à l'orange. Nous avons résisté jusqu'à présent mais le goûter dominical va leur être fatal !
  • And last but not least : un sac imprimé, kitsch à souhait, comme je le voulais, qui sera très pratique pour les sorties à la médiathèque, comme le suggère Cryssilda !
La même chose, en photos !




















Merci à Cryssilda, dont je vais découvrir le blog avec plaisir.

Et merci également à Ys pour l'organisation de ce swap !
La bibliographie qu'elle a établie est pleine de pistes à suivre pour de prochaines lectures !

lundi 13 octobre 2008

L'étrange disparition d'Esme Lennox

L'étrange disparition d'Esme Lennox - Maggie O'Farrell
Editions Belfond - 2008
Traduit de l'anglais par Michèle Valencia.


Iris Lockart, une jeune écossaise d'une trentaine d'années, reçoit un courrier de l'asile de Cauldstone, qui l'informe de la fermeture prochaine de l'établissement. La direction lui demande les dispositions qu'elle compte prendre pour l'hébergement de sa parente, Euphemia Lennox. Iris, dans un premier temps, croit à une erreur, mais une relance et des appels téléphoniques vont l'obliger à s'intéresser à la question.

Elle découvre alors qu'il s'agit de sa grand-tante, la soeur de sa grand-mère maternelle Kitty, qui vit elle-même dans un hopital, car elle est touchée par la maladie d'Alzheimer. Iris n'a jamais entendu parler d'Euphemia car Kitty a toujours déclaré être fille unique. Euphemia est placée à Cauldstone depuis soixante ans, oubliée du monde.
Iris, qui traverse une période de flottement dans sa vie personnelle, organise le transfert de sa grand-tante vers un foyer, mais renonce à l'y laisser, à cause des conditions d'hébergement. Elle l'installe chez elle, malgré le désaccord de ses proches. Elles vont apprendre à se connaitre et Iris va chercher à comprendre pourquoi Euphemia a été internée.

Dans ce roman, on découvre l'histoire au côté d'Iris, mais également à travers la mémoire d'Euphémia ou plutôt d'Esme, puisque c'est ainsi qu'on l'appelait lorsqu'elle était enfant, et puis aussi par bribes, grâce aux souvenirs de Kitty, qui resurgissent de temps en temps de son pauvre esprit malmené par Alzheimer, décousus, incomplets.

C'est un secret de famille terrible qui émerge petit à petit, qui rappelle que dans les années 30, il fallait se conformer à l'idée que la bonne société se faisait de la jeune fille idéale. Il n'y avait pas de place pour la fantaisie, le naturel et l'excentricité, qui pouvait compromettre le mariage de la soeur aînée. Pas de place non plus pour l'écoute et la compréhension qu'il aurait fallu pour aider une jeune fille trop sensible à surmonter les traumatismes vécus.

C'est une histoire prenante, qu'on voudrait impossible. Pourtant, elle s'inspire de faits réels et on imagine sans peine les vies gâchées par des pratiques rigides et inhumaines.


Une très belle lecture, à l'image de la couverture du livre, magnifique !

Les avis de Bellesahi, Cathulu, Dasola et Marie.

London Swap (1)

J'ai posté mon colis ce matin.

Le contenu conviendra-t-il à son ou sa destinataire ? Je l'espère. Le choix fut difficile !!

Il ne me reste plus qu'à surveiller ma boîte aux lettres, à mon tour !

lundi 6 octobre 2008

Un abandon

Garden of love - Marcus Malte
Edité chez Zulma en janvier 2007.

Le mot de l'éditeur était pourtant engageant :

Troublant, diabolique même, ce manuscrit qu’Alexandre Astrid reçoit par la poste ! Le titre : Garden of love. L’auteur : anonyme. Une provocation pour ce flic sur la touche, à la dérive, mais pas idiot pour autant. Loin de là. Il comprend vite qu’il s’agit de sa propre vie. Dévoyée. Dévoilée. Détruite. Voilà soudain Astrid renvoyé à ses plus douloureux et violents vertiges. Car l’auteur du texte brouille les pistes. Avec tant de perversion que s’ouvre un subtil jeu de manipulations, de peurs et de pleurs.
Comme dans un impitoyable palais des glaces où s’affronteraient passé et présent, raison et folie, Garden of love est un roman palpitant, virtuose, peuplé de voix intimes qui susurrent à l’oreille confidences et mensonges, tentations et remords. Et tendent un redoutable piège. Avec un fier aplomb.

Les avis positifs fleurissaient sur la blogosphère : Amanda, Laure, Marie, Emeraude, Florinette, Goelen.

Ce roman a obtenu de nombreuses récompenses, dont le grand prix des lectrices de ELLE, en 2008.

Pour toutes ces raisons, j'ai quand même insisté jusqu'à la moitié du livre, alors que dès les premiers chapitres, j'ai ressenti un certain malaise à la lecture de ce roman.

Et puis, tout d'un coup, alors que j'étais dans le bus, qu'il y avait dehors un très beau soleil qui illuminait la banlieue, j'ai refermé définitivement ce livre et décidé que cette histoire n'était pas pour moi : trop noire, trop glauque, trop dérangeante, sans doute.

Un extrait sur le site de Zulma.

jeudi 2 octobre 2008

Cafés de la mémoire

Cafés de la mémoire - Chantal Thomas
Publié en février 2008 aux éditions du Seuil.

A l'occasion du carnaval de Nice, la narratrice se réfugie dans un café, afin d'échapper au bruit et à la foule. Elle se remémore les multiples cafés qu'elle a fréquentés au cours de son existence, ce que lui ont apporté les ambiances et les gens.

Tout commence à Arcachon, lorsqu'elle écoute les récits de son grand-père,au retour de ses nombreuses haltes dans les cafés de la ville. Puis, vient le temps de l'adolescence, toujours à Arcachon puis à Bordeaux et enfin Paris, où elle vient étudier la philosophie. Elle veut suivre l'exemple de Simone de Beauvoir, acquérir son indépendance et profiter de sa jeunesse. Mais, trop confiante, elle n'évitera pas certains dérives, en particulier vers l'alcool.

J'ai beaucoup aimé le récit de l'enfance, la tendresse de la narratrice pour son grand-père, son amour pour sa ville natale, qu'elle décrit merveilleusement. Par la suite, j'ai trouvé que l'histoire se banalisait, même si le parcours de la jeune fille est emblématique de ces années 50-60.

C'est le premier texte de Chantal Thomas que je lisais, mais j'ai l'intention de poursuivre ma découverte de cet auteur, surtout depuis que j'ai lu ce billet sur "Les adieux à la reine".

Un avis sur ce livre chez MagLm.